Ventes immobilières: la réduction des droits d’enregistrement prolongée ?
L’appétence des Marocains pour l’investissement immobilier n’est plus à démontrer. Une fièvre pour la pierre qui résiste à tout, semble-t-il, même à la redoutable Covid-19. Si, à l’instar de plusieurs secteurs, l’immobilier a été heurté de plein fouet par la crise sanitaire et économique en 2020, la période post-confinement a connu un certain rebond. Dans une étude sectorielle rendue publique début février 2021, la plateforme de vente en ligne Avito démontrait que le secteur avait marqué une reprise réussie, enregistrant même des records de demande. La location représente 70% des biens immobiliers proposés sur la plateforme contre 30% pour les biens à vendre, générant 64% des total leads sur la location.
Toutefois, en termes de vues, les biens à vendre sont les plus consultés, à hauteur de 51%, relevait Avito. En 2020, les appartements à vendre sur Avito présentaient un prix moyen de 672.250 DH et de 796.000 DH pour les biens situés à Casablanca, pour une superficie moyenne de 84 m2. Preuve que les conditions d’achat immobilier sont jusqu’ici avantageuses, et cela n’est pas dû au hasard. En effet, pour encourager l’acte d’achat, il a été décidé, dans le cadre de la loi de Finances (LF) 2020, d’une réduction de 50% sur les droits d’enregistrement au profit des acquéreurs de logements et terrains destinés à un usage d’habitation, atteignant une valeur de 2,5 MDH, jusqu’au 31 décembre 2020. Cerise sur le gâteau, dans le cadre de la LF 2021, il a été décidé de la prolongation de cette mesure. Seulement voilà, ces conditions ne seront pas valables pour l’ensemble de l’année.
En effet, la loi de Finances 2021 prolonge, mais uniquement jusqu’au 30 juin 2021, l’exonération totale des droits d’enregistrement pour les actes portant première vente de logements sociaux et de logements à faible valeur immobilière, ainsi que la réduction des droits d’enregistrement de 4% à 2% du prix de vente pour les actes portant acquisition, à titre onéreux, des terrains nus destinés à la construction de logements ou de locaux à usage d’habitation dont le prix ne dépasse pas 4 MDH.
C’est dans ce contexte que le groupe parlementaire du PJD a sorti de ses tiroirs une nouvelle proposition pour le moins alléchante pour les acquéreurs. Celle-ci vise à proroger l’exonération et la réduction des droits d’enregistrement sur l’achat de logement pour habitation jusqu’à la fin d’année. Les arguments évoqués par les députés du Parti de la justice et du développement (PJD)sont liés à la persistance de la crise due à la Covid-19, beaucoup plus longue que prévu, disent-ils.
Une proposition qui tombe à point nommé
Il est aussi question, selon les députés «islamistes», de faire profiter les Marocains résidant à l’étranger de cette dérogation pendant la prochaine période estivale. Sachant que l’État déploie tous les moyens pour le retour des Marocains résidant à l’étranger dans le cadre de l’opération «Marhaba 2021», en décidant la reprise des vols de et vers le royaume à compter du mardi 15 juin, et que le potentiel d’achat en biens immobiliers de cette catégorie de citoyens est connu de tous, cet argument semble tenir la route.
L’amendement qui cible l’exonération des droits d’enregistrement (DE) du logement social à 250.000 DH et à faible valeur immobilière à 140.000 DH ou encore la réduction de 50% (prix plafonné à 4 MDH) tombent à point nommé, estime en tout cas Mohamadi El Yacoubi. Si l’on en croit le président du Cercle des fiscalistes du Maroc, cette mesure, qui s’applique aux biens immeubles et aux terrains destinés à la construction de l’habitation personnelle -qu’elle soit principale ou secondaire- «permettra d’éviter de revenir, à partir du 1er juillet, à la grille normale qui est de 4% pour l’achat d’un logement et de 5% pour les terrains nus en matière de DE». Et notre interlocuteur de poursuivre : «Cette incitation pourrait effectivement booster le marché de l’immobilier et l’aider à sortir de sa léthargie, due aussi bien au contexte pandémique qu’à la faiblesse du pouvoir d’achat des acquéreurs potentiels».
En plus de l’incitation fiscale, d’autres spécialistes préconisent des mesures plus «innovantes», comme l’instauration de plans épargne logement défiscalisés. Une piste qui devrait contribuer, à la fois, à relancer durablement le marché et permettre à l’État d’avoir de bonnes rentrées fiscales. Mais il en faudrait beaucoup plus pour rassurer les professionnels du secteur qui, malgré le rebond des ventes, affichent tristement leur scepticisme, estimant ne pas avoir suffisamment de visibilité.
Khadim Mbaye / avec Les Inspirations Éco