Economie

Afrique : le coût de l’inaction climatique

La performance économique future de l’Afrique est «inextricablement liée» à la durabilité mondiale. Africa Insights révèle le coût supportable de la transition face au prix exorbitant et asymétrique de l’inaction pour le continent.

L’Afrique peut-elle vraiment se permettre de regarder ailleurs ? Africa Insights balance les chiffres : l’inaction climatique arrachera à certains jusqu’à 30% de leur richesse. Même les producteurs de gaz africains y perdront. Continuer comme avant, c’est signer notre arrêt de mort économique.

Le rapport Africa Insights consacre un chapitre aux implications économiques de la transition durable en Afrique et offre une analyse sans concession, révélant des dynamiques cruciales souvent occultées. Une lecture attentive dévoile des enseignements stratégiques majeurs. Le premier est que la performance économique future de l’Afrique est «inextricablement liée» aux progrès globaux vers la durabilité.

L’analyse comparative de scénarios «Net-Zéro» (neutralité carbone en 2050, +1.6°C) et «Catastrophe Climatique» (inaction, +2.3°C en 2050) est éclairante. La transition aura un coût à court terme, principalement dû aux prix du carbone. Un coût qui se manifeste par une inflation accrue des prix à la production (via les taxes carbone et la hausse des prix de l’énergie) et un affaiblissement temporaire du PIB réel, car «l’inflation grignote les revenus réels».

Cependant, ce scénario, bien que difficile à court terme, constitue un investissement structurel. Cette pression s’atténue «au fur et à mesure que les économies s’éloignent des sources d’énergie à forte intensité carbonique taxées». Ainsi, le véritable danger réside dans l’inaction. Le scénario catastrophe offre «beaucoup moins de pression à la hausse sur les prix à la production à moyen terme», mais prive l’économie mondiale, et particulièrement l’Afrique, des gains de développement structurel et de coût à plus long terme associés à la transition verte. L’absence de transition verrouille donc une trajectoire de faible productivité et de vulnérabilité extrême.

L’Afrique, grande perdante de l’inaction
C’est ici que le rapport révèle une vérité cruciale et souvent sous-estimée : l’impact de l’échec de la transition est asymétrique et particulièrement dévastateur pour l’Afrique. Si les efforts mondiaux échouent, le continent subit des pertes disproportionnées.

Le rapport alerte : «Il y a un impact négatif asymétrique visible si les efforts de transition mondiaux déçoivent». Les projections sont sans appel. En 2050, par rapport à un scénario de référence à +1,9°C, le PIB réel du Botswana serait inférieur de près d’un tiers (-30%), et celui du Kenya d’environ un quart (-25%).

Des chiffres catastrophiques qui intègrent le double fardeau des «répercussions économiques d’anomalies météorologiques plus régulières» et de «l’impact économique plus large d’une demande plus forte de combustibles fossiles» qui pénalise les économies diversifiées ou non productrices.

Le paradoxe des producteurs : le cas ambivalent du Mozambique
Le Mozambique illustre un autre enseignement nuancé du rapport : la vulnérabilité climatique peut surpasser les bénéfices sectoriels, même pour les producteurs d’hydrocarbures. Son PIB est attendu légèrement inférieur au scénario de référence dans les deux cas extrêmes.

Dans le scénario «Net-Zéro», «une réduction de la demande en hydrocarbures pèsera sur les industries du charbon et du gaz» du pays. Mais, et c’est révélateur, dans le scénario catastrophe, «une demande plus forte pour ces biens ne compensera que partiellement les pertes de productivité associées à des chocs économiques plus réguliers».

Même en bénéficiant de prix élevés, les dommages physiques et la baisse structurelle de productivité induits par un climat déréglé annulent les gains sectoriels. Ce qui souligne que la dépendance aux énergies fossiles est un piège à long terme, même sans transition.

L’impératif stratégique : volatilité certaine, adaptation clé
La conclusion stratégique du rapport sur ce sujet est sans équivoque : «Un climat changeant entraînera sans aucun doute une volatilité macroéconomique, quels que soient les progrès réalisés en matière de transition». Une réalité incontournable qui impose une réponse centrale : «La capacité d’adaptation sera fondamentale». Cela exige des entreprises, comme des gouvernements, une approche proactive et résiliente. «Cela nécessite de prévoir des marges de manœuvre dans les budgets et une planification de scénarios prudente».

Au-delà des chiffres, une feuille de route pour la résilience
Ainsi, le rapport Africa Insights transcende la simple modélisation prospective ; il révèle des dynamiques fondamentales dictant l’action immédiate. La transition vers une économie durable implique un coût tangible à court terme, principalement via l’inflation induite par les politiques climatiques, mais ce coût est dérisoire face au prix exorbitant de l’inaction, particulièrement pour l’Afrique, continent structurellement exposé aux chocs climatiques.

Plus fondamentalement, les risques sont profondément asymétriques. Un échec global de la transition climatique infligerait des dommages bien plus sévères aux économies africaines – comme en attestent les pertes potentielles de 30% du PIB au Botswana ou 25% au Kenya d’ici 2050 – que les ajustements requis par la transition elle-même. Une vulnérabilité qui ne connaît toutefois aucune exception, comme le démontre le cas ambivalent du Mozambique qui révèle que même les économies dépendantes des hydrocarbures subissent des pertes nettes dans un scénario de catastrophe climatique, où des gains sectoriels éventuels sont annihilés par les pertes de productivité dues aux dérèglements climatiques généralisés, faisant d’elles des victimes collatérales inévitables.

Une réalité qui consacre l’inéluctabilité de la volatilité macroéconomique liée au climat, qui doit désormais intégrer le cœur de la planification stratégique et financière, exigeant impérativement l’incorporation de marges de sécurité robustes et une agilité opérationnelle accrue.

Par conséquent, l’adaptation systémique cesse d’être une option pour devenir un impératif de survie économique ; la capacité à anticiper les chocs, absorber leur impact et se réinventer face à la double pression du dérèglement climatique et de la transition énergétique mondiale s’impose comme la compétence stratégique ultime pour tout décideur africain ou acteur économique sur le continent.

L’heure est à la planification prudente de scénarios

Le rapport sonne l’alarme : l’Afrique ne peut se permettre d’être spectatrice. Sa résilience économique future dépend de sa capacité à intégrer cette analyse dans ses politiques, ses investissements et ses modèles d’affaires, transformant la contrainte climatique en levier d’une croissance véritablement durable et inclusive. Comme le souligne implicitement le rapport, l’heure n’est plus à la seule réflexion, mais à «une planification de scénarios prudente» et à l’action anticipatrice.

Bilal Cherraj / Les Inspirations ÉCO


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