Culture

Le haïk souiri, une tenue vestimentaire aujourd’hui en voie de disparition

Le haïk souiri, cette tenue vestimentaire qui faisait partie pendant des siècles des coutumes vestimentaires des citadines de la cité des Alizés, est aujourd’hui en voie de disparition.

Rares sont en effet les femmes souiries qui portent aujourd’hui encore le haïk qui représente l’une des composantes du riche patrimoine vestimentaire marocain réputé dans les quatre coins du globe.

Symbole de pudeur et de décence, ce vêtement, qui tenait une grande place dans la société, est tombé en désuétude, disparaît peu à peu, laissant place sous l’effet de la mondialisation à des vêtements en provenance des pays occidentaux, du Moyen-Orient ou de pays musulmans.

Seules quelques vieilles femmes, jalouses de leurs traditions, arborent encore fièrement leur haïk, symbole de leur attachement aux traditions.

Hajja Amina, une Souirie de souche et parmi les rares femmes à Essaouira qui portent encore cette tenue ancestrale, indique que le haïk est un costume d’extérieur des citadines marocaines qui est d’une grande simplicité et sobriété, à la différence des vêtements portés pour les fêtes ou autres cérémonies.

Celui porté à Essaouira est généralement une longue couverture de laine semblable à la « Battaniya », rayée transversalement de bandes bleues en son extrémité, a-t-elle précisé.

Finement brodé, le haïk est attaché d’abord sous les bras et le reste du tissu fait deux fois le tour de la tête, explique cette Souirie née dans les années 40 du siècle dernier.

Pour Hajja Amina, ce voile qui avait un aspect pratique car facile à porter, est resté pendant des siècles la tenue vestimentaire féminine par excellence, qui permettait de réaffirmer quotidiennement l’attachement des femmes à leur identité vestimentaire et à leurs valeurs culturelles et civilisationnelles ancestrales. Il était en outre, dit-elle, indissociable du caractère conservateur de la société souirie.

Hajja Amina constate avec amertume que le haïk, qui est aussi un repère culturel, fait désormais partie du passé et a tendance à se perdre et à se faire remplacer par d’autres tenues.

Aussi appelle-t-elle à promouvoir et réhabiliter cette mythique tenue vestimentaire, aujourd’hui en voie de disparition, en lui redonnant sa valeur véritable et en lui donnant une seconde vie pour qu’elle demeure un élément de fierté pour toute la ville.

Pour ce faire, elle a appelé à l’intégrer à l’artisanat de la ville afin de faire découvrir aux nouvelles générations cet habit traditionnel qui conférait une certaine élégance et une allure particulière à celles qui le portaient.

Hajja Amina déplore que le port du haïk soit interprété de façon erronée et soit incompris par certains visiteurs de la ville, notamment étrangers, qui y voient une pratique attentatoire à la dignité et à l’égalité entre les hommes et les femmes voire une marque de sous-développement.

De son côté, Zineb, une militante associative à Essaouira, constate que le haïk a presque disparu des grandes villes aujourd’hui et qu’on ne le voit plus que très rarement, surtout dans les villes de Chefchaouen et d’Essaouira où il continue de résister, tant bien que mal, devant les nouveaux us et modes de vie.

Et de souligner que cet habit ancestral a été détrôné par d’autres tenues en provenance des pays occidentaux ou du Moyen-Orient et par la djellaba portée dans l’ensemble des villes du Royaume. A la différence du haïk, note-t-elle, cette dernière a survécu à toutes les mutations sociales et est devenue omniprésente grâce à un renouveau de style.

Notre interlocutrice constate que l’adoption de tenues vestimentaires « modernes » est l’une des manifestations de l’évolution de la société souirie et marocaine et de son ouverture aux autres cultures.

Bien qu’il soit devenu pratiquement un fait exceptionnel de croiser dans une rue de la cité des Alizés une femme vêtue de haïk, il n’en demeure pas moins que cet habit qui a inspiré nombre de poètes, d’artistes peintres et de photographes, reste toujours présent dans les mémoires et les souvenirs des Souiris nostalgiques du bon vieux temps.

 ( Fouad BENJLIKA-MAP)

 

 


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