Politique

Jugement de Maati Mounjib: une valeur test pour la liberté de la presse

Après de longs mois d’attente, sept journalistes et activistes marocains dont l’historien Maâti Mounjib sont jugés aujourd’hui pour « atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat » et pour avoir formé des personnes au journalisme citoyen à travers l’application Free Press Unlimited.

Selon les documents officiels du tribunal, cinq des prévenus, notamment l’historien Maâti Mounjib, sont accusés d’«atteintes à la sûreté intérieure de l’État » par le biais d’une « propagande » de nature à « ébranler la fidélité que les citoyens doivent à l’État et aux institutions du peuple marocain » (article 206 du Code pénal). S’ils sont déclarés coupables, ils pourraient se voir infliger une peine allant jusqu’à cinq ans d’emprisonnement.

Maâti Mounjib est par ailleurs inculpé d’escroquerie. Les deux autres prévenus, les journalistes Maria Moukrim et Rachid Tarik, sont jugés pour avoir « reçu des fonds étrangers sans en avoir informé le secrétariat général du gouvernement ».

Les journalistes sont aussi accusés d’avoir organisé des formations sur Story Maker, une application en logiciel libre téléchargeable sur internet. Ces ateliers de formation ont été organisés dans le cadre d’un programme de promotion du journalisme citoyen au Maroc et initiés par le Centre Ibn Rochd et l’Association marocaine d’éducation de la jeunesse (AMEJ), en partenariat avec l’ONG néerlandaise Free Press Unlimited.

Ces derniers mois, le gouvernement marocain a annoncé haut et fort de grandes réformes dans le domaine de la justice, et notamment une refonte du Code pénal. Adopté par le gouvernement le 9 juin, ce projet de loi contient des dispositions positives en matière de droits humains. L’article 206, restreignant la liberté d’expression, demeure toutefois inchangé, ce qui met en évidence les profondes défaillances persistantes de la loi.

Depuis le début de cette affaire, considérée comme une atteinte à la liberté d’expression, les ONG de défense des droits de l’Homme (AMDH, Amnesty International, Reporters sans Frontières, Comité pour la Protection des Journalistes, etc.) suivent de près ce « procès politique ».

Le procès de ces journalistes aura une véritable valeur test pour la liberté de la presse au Maroc. Les prévenus sont :

– Maâti Monjib, 54 ans, historien et fondateur du Centre Ibn Rochd d’études et de communication, président de l’ONG Freedom Now (qu’il a créée avec Ali Anouzla) et membre de l’Association marocaine pour le journalisme d’investigation (AMJI). S’exprimant régulièrement au sujet de la politique marocaine dans les médias internationaux, au sein de clubs de réflexion et sur la scène universitaire, il est une personnalité importante parmi les hommes et les femmes visés par ces poursuites.

– Abdessamad Ait Aicha (connu sous le nom de Samad Iach), 31 ans, journaliste, ancien employé du Centre Ibn Rochd d’études et de communication, et membre de l’AMJI.

– Hicham Mansouri, 35 ans, journaliste et ancien employé de l’AMJI, récemment remis en liberté après avoir purgé une peine de 10 mois de prison. Amnesty International craint que sa condamnation n’ait été motivée par des considérations politiques.

– Hicham Khreibchi (connu sous le nom d’Hicham Al Miraat), 39 ans, médecin, fondateur et ancien président de l’Association des droits numériques (ADN), et ancien responsable des actions de plaidoyer à Global Voices.

– Mohamed Sber, 44 ans, président de l’Association marocaine pour l’éducation de la jeunesse (AMEJ).

– Maria Moukrim, 39 ans, journaliste, ancienne présidente de l’AMJI.

– Rachid Tarik, 62 ans, journaliste (à la retraite), président de l’AMJI.

Hicham Lamrani


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