Economie

Achats en ligne sur Amazon, Airbnb… un trou dans la raquette du fisc

Une partie «non négligeable» de la TVA sur les biens et services achetés via les plateformes Internet par des particuliers, voire des entreprises, échapperait aux radars de l’administration fiscale.

Comment, en effet, appréhender la taxe sur la valeur ajoutée relative à un logiciel acquis en ligne ou sur ces centaines de milliers de nuitées d’hébergement que réalise, tous les ans, Airbnb auprès des Marocains qui font «discrètement» référencer leur appartement dans la base de données de ce qui est considérée comme la plus grande chaîne hôtelière sans hôtels au monde ?

C’est clairement un casse-tête et un trou dans la raquette de la collecte de TVA. Il s’agit d’un problème presque mondial contre lequel les administrations fiscales tentent de trouver la parade. Pas un forum international ne traite la question de la fiscalisation du commerce électronique.

Ces difficultés d’application de la TVA sont une illustration de la rupture de règles fiscales, conçues au début du siècle dernier, par l’explosion des ventes en ligne. La doctrine nationale tente de suivre comme elle peut ces évolutions, mas à la pratique, ni les réglementations, ni les notes de service de l’administration fiscale ne règlent les problèmes relevés sur le terrain.

L’exemple des nuitées d’hôtellerie vendues à Airbnb par des particuliers – qui mettent leurs logements à la disposition des clients de cette plateforme – est symptomatique de l’évasion de recettes de TVA subie par le Trésor.

Cette hôtellerie discrète et totalement «informelle» constitue, aujourd’hui, une complément de revenus pour des milliers de personnes. Elle s’est développée, ces dernières années, avec le changement des habitudes de consommation de touristes qui composent par eux-mêmes leur propre package, faisant chuter les forfaits de voyage à seulement 30% du marché.

Ce que dit la réglementation sur les modalités de collecte de la TVA

Selon l’article 115 du Code général des impôts, toute personne n’ayant pas d’établissement au Maroc et y effectuant des transactions imposables, doit faire accréditer localement un représentant auprès de l’administration fiscale. C’est ce dernier qui est redevable de la TVA exigible.

Il doit s’engager à se conformer aux obligations auxquelles sont soumis les contribuables exerçant au Maroc et tenu, par conséquent, de déclarer et de verser la TVA exigible, après déduction de la taxe éventuellement payée à des sous-traitants établis dans le Royaume, dans le mois qui suit celui au cours duquel le paiement a été effectué.

Or, il s’est avéré dans la pratique que l’application de ces dispositions soulève des difficultés liées à la gestion des dossiers fiscaux, tant pour leurs fournisseurs étrangers non résidents que pour les clients marocains. Ainsi, ces derniers se trouvent assujettis au paiement de la TVA due par l’entreprise non résidente qui n’a pas désigné un représentant fiscal, en application des dispositions de l’article 115 du CGI, relève Mohamed Rifi, expert-comptable.

Dans des cas contraires et bien que l’entreprise non résidente ait désigné son représentant fiscal, les clients marocains, notamment les administrations, procèdent à la retenue à la source de la TVA due par l’entreprise non résidente. Pour pallier ces difficultés, le législateur a modifié l’article 115 du CGI, en ce sens qu’à défaut de désignation d’un représentant fiscal, le client marocain est considéré comme étant le redevable légal de la TVA et ce, en vue de simplifier et d’alléger les obligations fiscales incombant aux opérateurs économiques. Lorsque l’entreprise non résidente cesse toute activité au Maroc, son mandataire doit en informer par écrit le fisc, pièces justificatives à l’appui.

Au vu de ces documents, l’identifiant fiscal attribué à l’entreprise non résidente est en principe, résilié. À défaut de désignation d’un représentant fiscal, le client est obligatoirement redevable de la TVA due, en lieu et place de la personne non résidente réalisant une opération taxable au Maroc. Cette inversion du redevable légal est connue sous l’appellation de système d’autoliquidation. Par conséquent, le client de droit marocain est tenu de déclarer, selon son régime d’imposition, la taxe due par la personne non résidente simultanément à celle du chiffre d’affaires du mois ou du trimestre qui suit celui du paiement et d’opérer la déduction de la TVA.

L’article 115 du CGI déconnecté ?

Toute personne n’ayant pas d’établissement au Maroc, et y effectuant des opérations imposables au profit d’un client établi au Royaume, doit accréditer auprès de l’administration fiscale un représentant domicilié au Maroc. Ce dernier doit s’engager à se conformer aux obligations auxquelles sont soumis les contribuables exerçant leurs activités sur le territoire national et à payer la taxe sur la valeur ajoutée exigible.
À défaut d’accréditation d’un représentant, la taxe due par la personne non résidente doit être déclarée et acquittée par son client établi au Maroc. Dans ce cas, lorsque le client exerce une activité passible de la taxe sur la valeur ajoutée, il doit déclarer le montant hors taxe de l’opération sur sa propre déclaration de la taxe sur la valeur ajoutée, calculer la taxe exigible, et procéder à la déduction du montant de ladite taxe exigible ainsi déclarée.
Lorsque le client exerce une activité exclue du champ de la taxe sur la valeur ajoutée, il est tenu de procéder au recouvrement de ladite taxe due au nom et pour le compte de la personne non- résidente par voie de retenue à la source.
Abashi Shamamba / (avec Les Inspirations ÉCO)


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