OPINION DU WEB

Hôtesse mannequin à Marrakech: l’envers du décor

par Itimaid Sghair

Cette chronique a pour but de raconter ce que vous ignorez au sujet de ma vidéo du dimanche, le mini-teaser du week-end dernier au Grand prix de Marrakech.

Sachez que les apparences sont trompeuses et que ce n’était pas une partie de plaisir d’être hôtesse mannequin pour une agence lors de cet événement.

Nous étions au total 24 filles de Rabat, Casablanca et Marrakech. Toutes travaillaient sans avoir signé aucun contrat avec ladite agence.


Nous étions majoritairement des Marocaines et quelques Européennes. Première chose qui fait mal au cœur: ces dernières sont mieux traitées et mieux payées que les Marocaines parce qu’elles sont tout simplement blondes aux yeux clairs!

Nous Marocaines, nous sommes payées 2800 dirhams pour la soirée du vendredi et pour le week-end. Difficile de connaître le cachet des Européens qui reste tabou.

Je suis arrivée à Marrakech vendredi matin avec les filles de Rabat et Casablanca. Nous avons été dispatchées dans deux appartements qui n’étaient pas bien équipés. Pas de lumière dans les salles de bain, les toilettes étaient bouchées, pas de serviette, pas assez de lits pour tout le monde… Bref, le confort minimum n’était pas au rendez-vous.

Je tiens à souligner que dans ce métier, il est impératif d’arriver environ au moins 4 heures avant les autres, alors que le Brief ne dure pas plus de 10 minutes. Nous restons des heures à ne rien faire, en attendant que tout se mette en place. Ce qui est normal et je ne m’en plains pas.

Autre petit détail: en essayant nos robes, nous nous sommes rendues compte qu’elles avaient des fentes très hautes. Nous étions donc obligées de les tirer constamment vers le bas.

Vendredi soir, a eu lieu l’inauguration de l’événement à l’hôtel Royal Palm. Nous avons été placées au quatre coins du palace. Quelques filles à l’intérieur et d’autres à l’extérieur. Pour mon plus grand bonheur (j’ironise), je faisais partie de celles placées à l’extérieur. Je me devais de rester immobile de 19h à minuit, réduite à dire un bonsoir aux invités. Il faisait un froid glacial, mais «pas le droit de se plaindre», la loi dans ce genre de travail c’est « sois belle et tais-toi ».

Si un invité essaye d’entamer une discussion, on nous remet illico presto à notre place… alors que nous devons en même temps rester polies et courtoises. C’est tout-à fait normal de vivre une situation pareille quand on a décidé d’être hôtesse, mais ce que je reproche aux responsables de l’agence, c’est la manière avec laquelle il nous ont traitées et le favoritisme à l’égard des étrangères.

À 21h, une Européenne ne pouvait plus tenir à l’extérieur. La responsable l’a faite sortir pour la remplacer par une Marocaine. J’ai gelé de 19h à 22h45. Même les invités avaient remarqué ma fatigue… et me lançaient des «bon courage». Je n’avais rien mangé depuis le repas du midi. Au moment de la pause, on m’a servie un repas froid, des frites qui ne ressemblaient à rien et un sandwich à la kefta immangeable. La majorité des filles se sont contentées de boire un soda. Ne me dites pas que dans le monde entier, les hôtesses sont traitées de la sorte ?

Nous avons fini l’événement à 1h30 du matin et nous sommes arrivées à l’appartement complètement épuisées et gélifiées. Nous ne sentions plus nos pieds (nous portions des talons). Nous nous sommes couchées à 2h30 du matin et nous nous sommes réveillées à 7h00 pour nous diriger vers le circuit. Pas le temps de se reposer, tout s’enchaîne et cela fait partie de nos engagements.

Entre les commentaires pervers, quelques pilotes qui se permettaient de nous toucher les fesses pendant les séances de dédicace et le personnel qui nous demandait nos numéros de téléphone pour nous inviter à sortir le soir, ce travail est loin de plaire à toutes les filles. Mais c’est le moyen le plus rapide pour être indépendante et pouvoir s’assumer sans demander l’argent à papa et à maman en plus de pouvoir poursuivre les études.

Avec du sparadrap, les filles essayaient tant bien que mal de se soigner les pieds avant les reprises. Dommage que rien ne soit mis en place pour que les filles se sentent mieux…juste un peu mieux…

Dimanche soir, après la dernière séance de dédicace, je ressentais une douleur atroce aux yeux, un début de conjonctivite. J’étais placée derrière Mehdi Bennani et je me forçais à sourire pendant que la douleur me rongeait. Au moment de la dernière pause, avant la fin de l’événement, je suis vite allée aux toilettes pour soulager ma douleur, en vain. J’ai passé 20 minutes assise enfermée devant la cuvette des toilettes à pleurer toutes les larmes de mon corps.

A mon retour, je récolte une réflexion d’une des responsable: « Je te félicite  » d’un air de reproche. Sympa. L’autre responsable ne m’a pas adressée la parole de toute la soirée. Au début de l’événement, les personnes de l’agence passaient leur temps à nous badigeonner de mots gentils : « ma chérie » « mon amour » « ma puce »… À la fin de l’événement c’était plutôt : « merci les filles, bonne route ».

Il était convenu que nous allions être payées à la fin de l’événement, finalement les choses se sont passées autrement… Nous attendons toujours d’être payées.

Après cette révélation, je ne serai sûrement plus engagée et sûrement pas payée, mais j’aurais préservé ma dignité. Bilan de l’événement : des photos avec les filles, une grosse grippe et une conjonctivite aigue.

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