Economie

Sécurité alimentaire. L’IA, l’agriculture et les finances : une convergence prometteuse

Le potentiel de l’Intelligence artificielle pour améliorer la sécurité alimentaire est illimité. Zoom sur les outils développés par l’équipe de Dr. Dimitris Bertsimas et Ground Truth Analytics, en partenariat avec l’OCP, pour surveiller les saisons agricoles, détecter les problèmes de croissance des cultures et optimiser les rendements.   

L’utilisation de l’IA pour dérisquer la chaîne de valeur alimentaire est un exemple concret de la manière dont les avancées technologiques peuvent être mises au service de l’économie mondiale. Il est clair que les outils numériques, tels que l’IA, jouent un rôle essentiel dans la transformation de l’agriculture et dans la création d’un avenir plus résilient pour tous.

Dans le cadre de l’événement «The Voice of Africa» organisé par l’UM6P sur la sécurité alimentaire et la durabilité, Dr. Dimitris Bertsimas, expert en intelligence artificielle et professeur à MIT, a partagé ses réflexions sur l’application de l’intelligence artificielle pour améliorer la sécurité alimentaire en Afrique, dans un contexte où la complexité actuelle de l’agriculture, notamment de l’application des nutriments et de la gestion des sols méritent d’être soulignés.

Lors de son intervention, Dr. Bertsimas a présenté les travaux qu’il a réalisés en collaboration avec ses étudiants doctorants et la société Ground Truth Analytics, en partenariat avec l’OCP.

«En collaboration avec certains de mes doctorants au MIT et en partenariat avec l’OCP, nous avons créé une entreprise appelée Ground Truth Analytics. Nous avons collecté des données à l’aide d’environ 500 agents à travers l’Afrique, soit environ 500.000 parcelles provenant de sept pays africains : le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Nigeria, le Kenya, le Rwanda et le Maroc. Deux autres pays vont s’ajouter, la Tanzanie et l’Éthiopie», explique-t-il.

Leur approche repose sur l’utilisation de l’intelligence artificielle et des données satellitaires pour prendre des décisions éclairées en matière d’agriculture. Le panéliste a présenté plusieurs modules développés grâce à l’IA. Le premier module consiste en la délimitation des champs, permettant ainsi de connaître les terres arables dans chaque pays. Le deuxième module est la détection des cultures, basée sur les informations satellitaires, qui permet d’identifier les cultures présentes dans une région donnée. Le troisième module est la détection phénoménologique, qui permet de suivre l’évolution de la croissance des cultures tout au long de la saison. Enfin, ils collectent également des données météorologiques telles que la température, les précipitations et les indices de végétation. Ces outils numériques ont un impact significatif sur la sécurité alimentaire en Afrique. Ils permettent aux gouvernements de surveiller les saisons agricoles et de réagir en conséquence. Par exemple, lorsque les prévisions indiquent une saison peu favorable, les gouvernements peuvent planifier des importations alimentaires afin d’éviter une crise alimentaire.

De plus, en détectant les signes précoces de problèmes de croissance des cultures, il est possible de prévenir la propagation de maladies en utilisant des pesticides de manière ciblée. Ces outils aident également à façonner les politiques agricoles, en déterminant les types de cultures adaptées à chaque région et en planifiant les infrastructures nécessaires. Ils contribuent également à optimiser l’utilisation des ressources en eau et à développer des chaînes d’approvisionnement efficaces.

Cependant, malgré les progrès réalisés dans divers domaines de l’agriculture, il reste un objectif qui n’a pas encore été atteint. Celui-ci consiste à développer un système qui conseille les agriculteurs en matière d’assurance, de prêts, de semences et d’irrigation.

«L’objectif que nous n’avons pas encore atteint est de développer un système qui conseille les agriculteurs en matière d’assurance, de prêts, de semences et d’irrigation», souligne Dr. Dimitris Bertsimas.

Mais vu l’intérêt croissant pour l’application des technologies de l’information et de l’intelligence artificielle dans l’agriculture, ainsi que les avancées constantes dans ce domaine, il est fort probable que cet objectif soit atteint dans un avenir proche. En effet, les chercheurs et les entreprises travaillent activement pour développer des systèmes sophistiqués qui peuvent fournir des conseils précis et personnalisés.

Par conséquent, il est raisonnable de penser que cela ne saurait tarder. L’utilisation de l’intelligence artificielle dans le domaine de l’agriculture offre donc de nombreuses perspectives pour renforcer la sécurité alimentaire. Grâce à l’analyse des données satellitaires et à l’application de modèles d’IA, il est possible de prendre des décisions éclairées et d’optimiser les rendements agricoles. Cependant, il convient de souligner que ces outils doivent être utilisés de manière complémentaire avec les connaissances locales et l’expertise des agriculteurs. En effet, l’IA ne peut pas se substituer à l’expérience et à la connaissance pratique des agriculteurs, mais elle peut les soutenir dans leurs prises de décision.

 L’IA au service de la dérivation des risques dans la chaîne de valeur alimentaire
Alors que l’agriculture traverse une révolution, où les agriculteurs sont désormais sollicités pour prendre soin des sols et de l’eau en plus de produire des denrées alimentaires, il devient essentiel de mobiliser des financements pour faciliter cette transition vers une nouvelle agriculture. Dr Bertsimas souligne comment l’IA peut jouer un rôle clé dans ce processus en dérisquant les investissements allant des gouvernements aux institutions financières jusqu’aux agriculteurs.

«L’utilisation de l’IA offre aux gouvernements une compréhension approfondie de la production agricole à l’échelle nationale grâce à des images satellites. Cela permet une surveillance dynamique des cultures, révélant les zones touchées par des maladies et facilitant l’application ciblée de pesticides. De plus, ces outils fournissent des informations cruciales pour la gestion des ressources en eau, permettant aux gouvernements de prioriser leur allocation», explique le professeur à MIT.

Dans les pays africains largement dépendants de l’agriculture, ces outils d’IA offrent une vision approfondie de l’économie agricole, permettant aux gouvernements de prendre des mesures préventives pour dérisquer leur économie nationale. Du point de vue des institutions financières, l’IA permet une meilleure prédiction des rendements agricoles, ce qui facilite l’évaluation des risques lors de la souscription d’assurances et de l’octroi de prêts aux agriculteurs. En disposant de prévisions plus précises, les institutions financières peuvent mieux évaluer les revenus futurs des agriculteurs et adapter les conditions d’assurance et de prêt en conséquence.

Cette utilisation de l’IA offre donc une proposition de dérivation des risques pour les institutions financières. Enfin, pour les agriculteurs eux-mêmes, les outils d’IA offrent des recommandations précieuses concernant le choix des cultures, les rotations et les fertilisants, permettant ainsi de maximiser les rendements et de réduire les risques inhérents à leurs activités. En améliorant les rendements agricoles, les outils numériques contribuent à augmenter les revenus des agriculteurs tout en réduisant considérablement leurs propres risques. En somme, l’intervention du Dr Dimitris Bertsimas souligne comment l’utilisation de l’IA peut apporter des avantages significatifs en matière de dérivation des risques dans la chaîne de valeur alimentaire. Les gouvernements peuvent mieux comprendre et anticiper les fluctuations de l’économie agricole, les institutions financières peuvent évaluer les risques plus précisément, et les agriculteurs peuvent optimiser leurs rendements tout en minimisant les risques. Cette convergence de l’IA, de l’agriculture et des finances offre des opportunités prometteuses pour assurer la sécurité alimentaire, relever les défis du changement climatique et améliorer les conditions de vie des agriculteurs.

Modeste Kouamé / Les Inspirations ÉCO


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