Culture

Pourquoi il faut visiter l’expo de Giacometti à Rabat

par Olivier Rachet

©DR
L’homme qui marche.

La rétrospective exceptionnelle, proposée par le musée d’art moderne Mohammed VI de Rabat, permet tout d’abord de retracer le parcours d’un des sculpteurs les plus importants du XXe siècle.

Si son père creusait la voie lumineuse ouverte par les peintres impressionnistes, Alberto Giacometti, de son côté, explora la révolution des formes inaugurée par le cubisme, comme en témoignent à la fois ses premières peintures et des sculptures étonnantes qui nous remettent en mémoire l’influence qu’eut aussi sur lui le mouvement surréaliste auquel il adhéra un temps.

A l’image de ce tableau « La Montagne » de 1930 qui rappelle le motif cézannien de la Sainte-Victoire ou de cette sculpture « Tête crâne » de 1934 qui fait écho à l’univers de Braque. De nombreuses compositions, auxquelles s’ajoutent des dessins ou des esquisses, ancrent le travail du sculpteur suisse dans l’effervescence esthétique du début du 20e siècle.


Puis, on aborde l’influence qu’eurent sur Giacometti les arts du continent africain, et plus précisément la peinture égyptienne dont le hiératisme constitue, sans aucun doute, l’une des références majeures qui le conduira à affiner de plus en plus les formes de ses personnages.

Catherine Grenier, directrice de la Fondation Giacometti et commissaire de l’exposition, précise que c’est « en croisant l’analyse constructive du cubisme et la puissance iconique des sculptures égyptiennes et de l’art africain, que Giacometti élabore ses premières œuvres à l’esthétique moderne ».

Un plâtre peint, datant de 1955, « Figurine au grand socle » présente de lointaines affinités avec les dessins que l’on peut rencontrer sur les sarcophages égyptiens.

Surgissent alors les figurines qui ont fait la gloire de leur auteur, ces femmes debout, ces têtes d’homme tirées de la glaise ou cet « Homme qui marche » de 1960, clochards célestes à la fulgurante beauté. On croit assister souvent à l’origine même du mouvement, à l’irruption du geste.

On raconte dans les cosmogonies grecques que le titan Prométhée donna naissance au premier homme en malaxant la terre. La sculpture de Giacometti revêt une dimension prométhéenne, mais débarrassée de tous ses oripeaux idéalistes. Les hommes et les femmes que l’on sculpte dans la glaise sont comme les premiers êtres qui habiteraient un monde rendu à son matériau premier : la roche, le bronze, le minéral.

On ne peut occulter le fait que les motifs les plus connus de Giacometti furent travaillés, après la seconde guerre mondiale. Les premières images des corps déshumanisés, lorsque furent découverts les camps de concentration, semblent hanter la mémoire d’un homme dont le travail acharné consista à donner encore vie à ce qui restait d’une humanité décimée.

On se rappellera ce que Jean Genet écrivait, dans L’atelier d’Alberto Giacometti,pour rendre hommage à l’un de ses plus chers amis : « Ses statues semblent appartenir à un âge défunt, avoir été découvertes après que le temps et la nuit – qui les travaillèrent avec intelligence – les ont corrodées pour leur donner cet air, à la fois doux et dur d’éternité qui passe. Ou bien encore, elles sortent d’un four, résidus d’une cuisson terrible : les flammes éteintes, il devait rester ça ».

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