Prime de l’Aïd, IR, CNSS…ce qu’il faut savoir

Beaucoup de ménages comptent sur la «prime de l’Aïd» versée par certaines entreprises et certains établissements publics à leurs employés, pour les aider à faire face aux dépenses liées à la «grande fête». Une aide officieuse qui suscite de nombreuses interrogations. 

L’Aïd El Kébir, qui se déroulera à la fin du mois, promet d’être électrique cette année. Alors que l’inflation continue de sévir, de nombreux ménages doutent encore de leur capacité à relever les défis financiers découlant de cette grande fête annuelle. L’achat du mouton, en particulier, est un véritable casse-tête pour de nombreux foyers, dans un contexte de baisse généralisée du pouvoir d’achat de la population.

Beaucoup comptent donc sur la «prime de l’Aïd», versée par certaines entreprises et dans certains établissements publics aux employés, pour les aider à faire face à ces dépenses incontournables. Mais qu’en est-il réellement de cette aide ? En réalité, «il n’existe pas de prime de l’Aïd proprement dite dans la fonction publique», précise Mohamed Rahj, universitaire et fiscaliste.

Ce qu’il y a en réalité, ce sont «des pratiques développées par certaines administrations publiques qui déguisent la prime en indemnité de déplacement». Dans le secteur privé, poursuit ce spécialiste des politiques publiques, «la prime de l’Aïd existe, mais elle n’est pas généralisée». Il y a lieu toutefois de souligner que toutes les entreprises ne versent pas systématiquement cette prime, généralement comprise entre 1.500 DH et 2.500 DH par salarié dans le secteur privé. Dans la fonction publique, la pratique est plus répandue, mais des disparités existent entre ministères et établissements publics.

«Malheureusement, il y a certains ministères qui sont rentables sur le plan financier, tandis que d’autres ne le sont pas. Les premiers accordent plus de primes que les autres, et dans ce domaine, le Maroc n’est pas un cas isolé», explique Youmni Abdelghani, économiste et spécialiste des politiques publiques. Faut-il donc proposer une prime unique à tous les agents de l’État pour mettre fin à cette discrimination ? «Je suis contre la généralisation des primes dans la fonction publique, car les niveaux de productivité ne sont pas les mêmes», nuance notre interlocuteur, pour qui le montant des primes doit être proportionnel à l’effort fourni, et tenir compte de la nature du département et du degré d’engagement de chaque agent.

En revanche, il plaide pour «un traitement équitable pour l’ensemble des fonctionnaires en la matière», insistant sur la nécessité d’opérer une distinction entre un fonctionnaire et un agent de l’État. Quoi qu’il en soit, ajoute-t-il, que ce soit pour l’augmentation des salaires ou le versement de la prime de l’Aïd, l’établissement d’un décret instituant ces mesures va à l’encontre du principe même d’une économie de marché. C’est pourtant la principale revendication du moment. Les syndicalistes réclament l’adoption d’un décret qui tienne compte de la hausse du prix du mouton et du niveau général d’inflation. Bien que ce soit une période propice à l’octroi de gratifications, rien n’oblige les chefs d’entreprise à le faire. Abdelghani Youmni explique que «l’inflation se tasse et les prix – qui ont connu des hausses – ne reviendront pas à leur niveau d’avant la crise. Or, pendant la période de flambée des prix, les entreprises ont augmenté leurs marges».

Cependant, précise-t-il, «il faut souligner que c’est une liberté accordée aux entreprises de décider, de leur propre gré, d’accorder ou non des primes à leurs employés». Il est important de noter que la prime accordée à l’occasion de l’Aïd al-Adha est exonérée d’impôt, selon la note de service de la Direction générale des impôts (DGI), publiée en 2017, et en vertu de l’article 57-1° du Code général des impôts (CGI) sur les gratifications sociales.

Exonérée de l’IR
Comme nous l’avons vu dans une édition précédente, selon l’administration fiscale, les indemnités à caractère social liées à un événement familial sont exonérées dans la limite de 2.500 DH par an. Cela englobe l’ensemble des gratifications sociales liées à un événement familial, telles que l’achat d’un mouton pour Aïd al-Adha, l’allocation de rentrée scolaire, l’achat de jouets pour célébrer la fête de l’Achoura, les primes de naissance, mariage, circoncision, décès d’un ascendant ou descendant. Il convient néanmoins de souligner que le plafond exonéré de 2.500 DH doit couvrir l’ensemble des indemnités versées au cours de l’année pour les événements mentionnés ci-dessus.

En ce qui concerne l’exonération de la CNSS (Caisse nationale de sécurité sociale), il faut rappeler que la prime pour l’achat du mouton de l’Aïd, accordée forfaitairement une seule fois par an à l’ensemble du personnel, ne doit pas dépasser les 2.000 DH par an. Tout montant dépassant ce plafond sera soumis à la cotisation CNSS. Enfin, en ce qui concerne la nature du justificatif à présenter à l’administration fiscale, les experts-comptables suggèrent d’attribuer la prime en l’intégrant au bulletin de paie afin de bénéficier des dispositions dérogatoires.

Khadim Mbaye / paru dans Les Inspirations ÉCO

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